Diffusion Sélective de l'Information
Du 9 au 19 mai 2022


 

Vers une gouvernance d'entreprise durable : comment renforcer la prise en compte des enjeux environnementaux au sein des instances de gouvernance
«... L’intégration de la transition écologique dans les stratégies d’entreprises n’est aujourd’hui plus une option, tant il est vrai que l’avenir de la Terre doit entrer dans toute analyse économique pour qu’elle soit véritablement systémique. Ce nouveau paradigme s’impose désormais dans toute gouvernance d’entreprise, à la fois pour mieux internaliser les risques environnementaux et sociaux, s’adapter aux nouvelles attentes et aux nouveaux besoins des marchés et plus globalement pour assurer la durabilité économique, sociale et écologique dont les entreprises sont dépositaires.
Gouvernance d'entreprise durable: de quoi parlons-nous?
Les enjeux environnementaux actuels et l’évolution des objectifs de l’entreprise obligent les sociétés héritières de la pensée moderne post-industrielles, à revoir leurs modèles de développement. Cette remise en question passe nécessairement par une transition des entreprises vers des modèles d’affaires plus durables, afin de garantir «la permanence d’une vie authentiquement humaine sur terre».
Le concept de durabilité comporte trois volets que sont la durabilité économique, la durabilité sociale et la durabilité environnementale. Si ces trois dimensions doivent être abordées simultanément et de manière complémentaire afin de répondre aux enjeux globaux qui se posent aujourd’hui, cet article se concentrera sur le volet environnemental.
Dans ce cadre, il ambitionne de déterminer comment les entreprises peuvent s’organiser pour se maintenir et se développer dans la sphère économique, tout en préservant les limites planétaires de la biosphère et en étant moteur de la transition écologique. Cet article sur la gouvernance d’entreprise durable entend fournir des éléments de réponse à cette question.

1. Dessiner un cadre commun pour répondre aux enjeux environnementaux.
La remise en cause de nos représentations de la nature (les ressources ne sont plus considérées comme illimitées), couplée à l’évolution de la place de l’entreprise dans la société (l’entreprise est devenue un «objet d’intérêt collectif») pousse à dessiner un cadre commun de gouvernance d’entreprise durable.
1.1. Cadrage et définition
Dans quel contexte s'inscrit la gouvernance d'entreprise durable?
Urgence d’agir – Selon les dernières estimations de l’ONU, malgré les nouveaux engagements à 2030 annoncés juste avant et pendant la conférence sur le climat COP26, le monde se dirigerait toujours vers un réchauffement de 2,7 °C d’ici à la fin du siècle. Dans son évaluation mondiale de la biodiversité, l’IPBES, en 2019, faisait valoir une déstabilisation du système vivant planétaire, la disparition d’espèces, la dégradation des milieux et les pollutions qui mettent en péril l’avenir des sociétés humaines. Outre le changement climatique et l’érosion de la biodiversité, trois limites planétaires sont dépassées : la perturbation des cycles de l’azote et du phosphore, le changement d’occupation des sols et la pollution chimique («entités nouvelles»). Le rythme auquel les sociétés évoluent ne permettrait pas de rester dans «un espace de fonctionnement sûr pour l’humanité».
Il existe aujourd’hui un décalage entre les ambitions affichées par les acteurs économiques et les actions menées pour opérer la transition écologique, nécessaire au regard de ce contexte. Il s’agit donc de faire en sorte que les actions des acteurs économiques soient à la hauteur des objectifs annoncés.
Changer de paradigme – Ainsi, l’heure n’est plus à la formule de Milton Friedman «la seule responsabilité sociale de l’entrepreneur est d’augmenter ses profits». L’application de cette doctrine classique, encouragée par le marché et certains investisseurs, de «la valeur pour l’actionnaire» s’est souvent faite «au détriment de la création de valeur durable».
Cet état de fait pose deux enjeux majeurs :
- D’une part, pour la société : les impacts environnementaux ne sont pas suffisamment réduits et la transition vers un modèle plus durable tarde à se faire, augmentant le risque de multiples bouleversements à différentes échelles ;
- D’autre part, pour les entreprises : selon plusieurs études, elles identifient et traitent de manière insuffisante les risques susceptibles d’affecter leur modèle d’affaires et peuvent avoir des difficultés à intégrer de nouvelles opportunités potentielles. De plus, la poursuite d’un objectif exclusivement financier participe à la dégradation globale de l’impact environnemental des acteurs économiques : par exemple, en s’approvisionnant auprès d’entités basées là où les normes sont moins strictes et donc moins exigeantes sur l’atténuation des externalités environnementales négatives.
Au regard des éléments précités, la finalité de l’entreprise doit évoluer vers la création de la valeur pour l’ensemble de ses parties prenantes et l’apport de solutions durables aux défis environnementaux. Pour ce faire, l’entreprise doit faire évoluer son modèle de gouvernance.
Qu’est-ce que la gouvernance d'entreprise durable?
Gouvernance d’entreprise durable – Historiquement, la gouvernance d’entreprise se définit comme « l’ensemble de dispositions légales, réglementaires ou pratiques qui délimitent l’étendue du pouvoir et des responsabilités de ceux qui sont chargés d’orienter l’entreprise ». Cela inclut l’organisation et le fonctionnement des conseils d’administration et des comités exécutifs, les politiques d’incitations financières, les modalités de prise de décision stratégique, les relations avec les investisseurs et l’ensemble des parties prenantes, etc. Ce rapport entend par gouvernance d’entreprise durable l’ensemble des règles et pratiques au service du pilotage de l’entreprise durable.
Renforcer la place de la durabilité dans les systèmes de gouvernance – Aujourd’hui, bon nombre des plus grandes entreprises commencent à faire évoluer leur système de gouvernance pour prendre en compte les enjeux de durabilité mais, trop souvent, ces évolutions sont insuffisantes pour appréhender toute leur complexité.

Liens entre gouvernance et la responsabilité sociétale et environnementale des entreprises (RSE) ? – La gouvernance a toujours été un élément important des démarches RSE de deux manières. D’une part, parce que ces démarches, qui visent à prendre en considération les intérêts et attentes des parties prenantes, intègrent la prise en compte de l’intérêt des actionnaires, ce qui passe par l’organisation des relations entre dirigeants et actionnaires. D’autre part, parce que le pilotage de la démarche RSE supposait une gouvernance spécifique, comme par exemple l’instauration de comités des parties prenantes. La problématique de la gouvernance des entreprises durables va un cran plus loin.
E et S comme objectif, G comme moyen – Dans l’acronyme ESG, le G, qui arrive en dernière position, témoigne non seulement de l’attention portée aux actionnaires, mais est également un prérequis incontournable pour une réalisation efficace des deux premiers éléments. Si l’environnement (E) et le social (S) sont des objectifs, la qualité de la gouvernance d’une entreprise (G) ne constitue pas une fin en soi : il s’agit d’un moyen pour réaliser ses objectifs en matière environnementale et sociale. Une entreprise ne saurait répondre de manière efficace et ambitieuse à ces défis, sans une gouvernance permettant au préalable leur prise en compte par des instances dirigeantes compétentes et leur intégration dans la stratégie globale.
Étendre le champ de la RSE – Cette réflexion autour de la gouvernance d’entreprise durable est également l’occasion de questionner les champs couverts par le concept de RSE : sur le plan environnemental, la pratique se limite encore beaucoup aujourd’hui à l’évaluation et à la limitation des externalités négatives de l’entreprise et à l’estimation des impacts de l’environnement sur l’activité de l’entreprise (double matérialité). Or, dans une approche holistique du rôle de l’entreprise aujourd’hui, la RSE devrait s’articuler à partir de la notion de
contribution active à la transition écologique. Cet élargissement du périmètre renforce l’importance d’un pilotage éclairé et responsable de l’entreprise.

2. Assurer la résilience des entreprises et de notre société
L’intérêt pour une entreprise de faire évoluer sa gouvernance peut résider dans une meilleure appréhension des risques et des opportunités (volet « anticipation ») et dans sa participation à la transition écologique de nos sociétés (volet « contribution »).
2.1. Anticipation : maîtriser les risques et saisir les opportunités pour les entreprises
Réduire le négatif : maîtriser les risques pour faire face aux défis à venir
Parmi l’ensemble des risques auxquels font face les entreprises, les risques environnementaux, et notamment le changement climatique, sont prépondérants depuis plusieurs années. Selon le Forum économique mondial, sur les 10 risques les plus sévères anticipés pour la prochaine décennie, sont environnementaux. Ces enjeux restent cependant difficiles à cerner car systémiques et s’inscrivant dans un horizon temporel incertain.
Risques physiques et de transition – Les entreprises sont exposées à deux formes de risque environnemental :
• Les risques physiques, qui découlent directement du changement climatique et de la dégradation de l’environnement, notamment l’aggravation des phénomènes météorologiques aigües (feux de forêt, inondations, etc.) et chroniques (augmentation de la température moyenne, du niveau des mers, etc.), s’intensifient et engendrent des perturbations pour les entreprises ou les actifs (risques financiers, risques pour la chaîne d’approvisionnement, actifs échoués etc.) ;
• Les risques de transition, qui font généralement référence aux risques associés à la transition vers une économie durable (bas-carbone, respectueuse de la biodiversité, etc.). Celle-ci peut être la cause «d’importants changements politiques, juridiques, technologiques et de marché pour répondre aux exigences environnementales» ; Ces perturbations peuvent entraîner «l’immobilisation d’actifs, la perte de marchés, la réduction des retours sur investissement et des pénalités financières». La nature et l’ampleur de ces impacts dépendront de la rapidité avec laquelle les organisations développent des mécanismes de résilience.
Piloter l’incertitude – Une gouvernance adaptée et efficace est nécessaire pour que l’entreprise puisse affronter l’évolution du contexte dans lequel elle s’inscrit, gérer de manière active les nouveaux défis à relever, et renforcer ainsi ses capacités de résilience.
Accroître le positif : réconcilier performance et durabilité et saisir les opportunités
Gain de performance économique – De nombreuses études démontrent qu’il existe un lien de corrélation positif entre la performance des entreprises en matière de durabilité et leur performance financière. Une étude de la Harvard Business School fait référence en la matière. Elle compare un investissement de 1 dollar en 1993 dans un portefeuille pondéré en fonction de la valeur d’entreprises à forte durabilité et d’entreprises à faible durabilité. Le portefeuille à forte durabilité aurait atteint 22,60 dollars en 2010, tandis que le portefeuille à faible durabilité ne serait que de 15,40 dollars, soit une différence de plus de 46%.
Image de l’entreprise – Une performance élevée en matière de durabilité peut également améliorer l’image de l’entreprise et de son rôle dans la société. En effet, celle-ci peut souffrir d’une dépréciation concernant son impact environnemental et social. Si l’entreprise met en place une démarche durable solide, notamment au moyen d’une gouvernance pertinente, et qu’elle communique à ce sujet, ses engagements deviennent un catalyseur de l’image de marque.
Engagement des salariés – L’engagement des salariés, des clients et des fournisseurs de l’entreprise, ainsi que l’attraction de nouveaux talents, sont également renforcés. Ainsi, 68%
des salariés se voient toujours travailler dans leur entreprise dans 3 ans, chiffre qui monte à 79% dans les entreprises qui possèdent une fonction ou un service RSE.
Fidélisation des clients – 94% des citoyens de l’UE estiment que la protection de l’environnement est importante pour eux.
Néanmoins, à la lumière des enjeux à venir, atténuer les impacts environnementaux négatifs ne semble plus suffisant, les entreprises doivent jouer un rôle proactif en faveur de la transition écologique.
2.2. Contribution : Participer à la transition écologique de nos sociétés
Renforcer les objectifs et respecter ses engagements
Ces dernières années, les objectifs environnementaux, se multiplient : parmi eux, la neutralité carbone, la fin des plastiques à usage unique, l’objectif zéro artificialisation des sols, la fin des passoires thermiques et la lutte contre la déforestation importée.
Climat – Concernant les objectifs climatiques, pour atteindre l’objectif de 1,5°C fixé par l’Accord de Paris, l’économie européenne doit réduire ses émissions de 50% au cours de la prochaîne décennie. Cela suppose qu’au moins 65% des entreprises devront être totalement alignées sur l’objectif de Paris d’ici là, soit huit fois plus qu’aujourd’hui. Actuellement, le secteur des entreprises européennes se trouve sur une trajectoire de température allant de 2,3°C à 3,0°C. Cette décennie sera une période décisive pour les entreprises, qui devront élaborer des plans de transition plus ambitieux et plus solides sur les bases construites ces dernières années.
Biodiversité – Malgré des objectifs et des engagements croissants, les pressions sur les milieux naturels persistent : changements d’usage des sols et de la mer, exploitation accrue des ressources du vivant, pollution des milieux et les espèces exotiques envahissantes constituent les principaux facteurs de perturbation selon l’IPBES. La biodiversité reste insuffisamment traitée au sein des démarches environnementales, des entreprises : 36% des entreprises de SBF 120 (: indice boursier de la bourse de Paris) s’engagent sur des ODD biodiversité; 33% des entreprises de CAC 40 (: Indice représentatif de l'économie française) élaborent une stratégie biodiversité spécifique.
L’évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques conclut que les voies possibles pour concrétiser la Vision 2050 pour la biodiversité (de la Convention sur la diversité biologique) « exigent des changements fondamentaux au niveau des paradigmes du développement, […] en utilisant les terres, l’eau, l’énergie et les matériaux de façon bien plus durable ainsi qu’en repensant et modifiant de manière appropriée les habitudes de consommation et les chaînes de valeur mondiales »
Responsabiliser les entreprises dans la transition de nos économies vers un modèle durable
Faire sa part – La transition de l'économie et l’avènement d’un développement durable ne pourront pas se faire sans l’implication et la transition du secteur privé. La responsabilité incombe aux entreprises de revoir leurs modèles de croissance et d’intégrer l’environnement au plus haut niveau décisionnel.
L’enjeu est donc de responsabiliser les entreprises sur ces notions. Ainsi, comment organiser la gouvernance d’entreprise pour qu’elles anticipent les risques et opportunités et qu’elles contribuent à la transition vers un développement durable ? Pour répondre à cette question, ce rapport fait le choix de s’intéresser principalement aux enjeux environnementaux. L’analyse qui y est présentée s’articule autour de quatre axes :
- Renforcer la prise en compte des enjeux environnementaux par les instances dirigeantes.
En charge d’élaborer, de fixer et de mettre en œuvre la stratégie et les orientations de l’entreprise, les instances dirigeantes se trouvent au cœur de la gouvernance. Leur prise en compte accrue des enjeux environnementaux est la clé de voûte d’une gouvernance d’entreprise durable ;
- Intégrer les enjeux environnementaux dans les décisions stratégiques. La gouvernance d’entreprise comprend les modalités de prise de décisions stratégiques. Une entreprise durable est une entreprise qui se projette dans un avenir durable. Elle définit en conséquence une stratégie de durabilité et intègre les enjeux environnementaux dans ses prises de décisions.
- Accélérer l’atteinte des objectifs environnementaux par les politiques de rémunération. L’incorporation des enjeux environnementaux dans le fonctionnement de l’entreprise passe par leur inclusion dans les mécanismes incitatifs de rémunération à divers échelons de l’entreprise ;
- Favoriser l’engagement des investisseurs sur les sujets environnementaux. La poursuite d’un objectif de durabilité environnementale et la création de valeur à long terme supposent l’alignement de l’ensemble de l’écosystème impliqué dans la gouvernance de l’entreprise.
- Engager les investisseurs en faveur de la durabilité, en alignant leur stratégie avec les objectifs environnementaux des entreprises, constitue donc un enjeu majeur.

3. Renforcer la place des enjeux environnementaux dans les décisions d'investissement
3.1. Les enjeux des investissements durables réalisés par les entreprises
Certaines entreprises, pourtant dotées d’une stratégie RSE engagée, ne vont pas jusqu’à tenir compte des enjeux environnementaux dans leurs investissements; pourtant il est possible de favoriser et d’accentuer les investissements responsables (« verts ») des entreprises.
Internaliser les externalités – Afin de prendre en compte les enjeux environnementaux dans les décisions d’investissement, il s’agit d’internaliser les externalités environnementales des entreprises dans les processus de prise de décision. Toutefois, le manque d’une méthode harmonisée de mesure des externalités environnementales, tant négatives que positives, avec des indicateurs spécifiques et des données chiffrées et solides, est régulièrement cité comme un frein majeur.
Des risques matériels pour les entreprises – La contrainte écologique a un impact déterminant sur la valeur de l’entreprise, et cela doit apparaître dans ses prises de décision. À l’aune des crises environnementales à venir, tout actif peut devenir un actif échoué. Quelle est la valeur d’une entreprise du secteur pétrolier ? Sa rentabilité étant liée à ses réserves en pétrole et ses capacités à les exploiter, il est potentiellement exposé à des pertes très lourdes si les actifs en question se déprécient. Il ne s’agit pas uniquement de gérer le présent mais bien d’anticiper l’avenir pour assurer la pérennité de son modèle d’affaires. Le rôle d’un chef d’entreprise est de penser le futur, et ne peut se faire sans prise en compte de la crise climatique, et plus largement des enjeux environnementaux. En termes de gouvernance cette réflexion est fondamentale pour le conseil d’administration.
Au niveau financier, les acteurs bancaires, souhaitant maîtriser leurs risques, sont de plus en plus attentifs à cette notion d’actifs échoués. Et les régulateurs, chargés d’accompagner les entreprises dans l’adaptation de leurs modèles d’affaires face aux crises à venir, verront certainement leur rôle renforcé. Ainsi, l’enjeu n’est pas seulement que l’entreprise prenne en considération les impacts sociaux et environnementaux de ses activités, mais aussi – et peut-être surtout – qu’elle anticipe le fait que l’économie va devoir se transformer rapidement pour devenir durable.

Orienter les flux financiers – C’est tout l’enjeu de la taxonomie européenne, actuellement en cours de structuration : fournir, aux investisseurs et aux entreprises, une liste d’activités économiques contenant des critères leur permettant d’atteindre la durabilité environnementale, soit directement, soit en participant à la transition vers cette durabilité. L’objectif affiché est d’orienter les flux financiers vers les activités durables sur le plan environnemental et ainsi favoriser la transition de l'économie vers des modèles résilients.
Dans ce cadre, la taxonomie prévoit d’obliger les entreprises à communiquer sur le degré d’alignement de leur chiffre d’affaires, dépenses d’investissement (Capex) et d’exploitation (Opex) à l’un des six objectifs environnementaux élaborés.
De la même manière, la coalition d’acteurs financiers Climate Action 100+ recommande de communiquer sur:
• « La décarbonation des futures dépenses d’investissement :
- L’entreprise s’engage explicitement à aligner ses futures dépenses d’investissement sur son ou ses objectifs de réduction des GES à long terme ;
- L’entreprise s’engage explicitement à aligner ses futures dépenses d’investissement sur l’objectif de l’Accord de Paris de limiter le réchauffement climatique à 1,5° Celsius ;
• La méthodologie utilisée pour déterminer l’alignement de ses futures dépenses d’investissement sur l’Accord de Paris :
- L’entreprise publie la méthodologie qu’elle utilise pour aligner ses futures dépenses d’investissement sur ses objectifs de décarbonation, y compris les hypothèses clés et les indicateurs clés de performance ;
- La méthodologie quantifie les résultats clés, notamment la part de ses futures dépenses d’investissement qui sont alignées sur un scénario de 1,5° Celsius, et l’année au cours de laquelle les dépenses d’investissement dans les actifs à forte intensité de carbone atteindront leur maximum ».
Intégrer la durabilité dans les décisions d’investissements constitue l’une des clés de la transition du modèle d’affaires de l’entreprise.
3.2. Les outils existants pour intégrer l’environnement dans les décisions d’investissements
Afin de prendre des décisions éclairées en matière d’investissement, il convient tout d’abord d’identifier et quantifier les facteurs dont dépend la pérennité de l’activité sur le court et le long terme. À titre d’exemple, concernant les interdépendances avec les services écosystémiques (services rendus par la nature), des outils d’analyse et de calcul existent : bilan carbone, analyse cycle de vie, matrice de matérialité, etc. Au-delà de ces instruments, d’autres démarches et outils sont mis à disposition des acteurs (voir carrés d’information ci-dessous – panorama non-exhaustif des outils existants).

Le Natural Capital Protocol est un cadre décisionnel en libre accès qui permet aux organisations d’identifier, de mesurer et de valoriser leurs impacts directs et indirects et leurs dépendances vis-à-vis du capital naturel. Le NCP part du principe que toutes les organisations, à des degrés divers, sont dépendantes de la santé du monde naturel.
En permettant de comprendre les relations complexes que les organisations entretiennent avec la santé des actifs naturels et les services écosystémiques, le NCP permet de prendre des décisions plus éclairées. L’approche capitalistique entend permettre d’offrir des avantages aux employés, à la société, à l’économie au sens large et au monde naturel, parallèlement à leurs activités.
L’Indicateur d’Interdépendance de l’Entreprise à la Biodiversité (IIEB) – Cet indicateur développe une méthode simple permettant aux acteurs de produire une autoévaluation de l’interdépendance d’un produit semi-fini, fini ou d’une activité (au niveau groupe, multinationale ou d’une collectivité) à la biodiversité. Il permet de fédérer les énergies et les intelligences en interne et constitue à la fois un outil de sensibilisation et d’aide à la prise de décision. En permettant la réappropriation de ces enjeux, ce travail constitue un premier pas vers l’élaboration d’un plan stratégique des entreprises en faveur de la biodiversité. Il leur permet de repenser leurs activités à la lumière de leurs interdépendances à la biodiversité.

Prix du carbone interne – Sans attendre l’intégration de prix du carbone dans les économies de tous les pays, certaines entreprises ont choisi de fixer volontairement un prix à leurs émissions de gaz à effet de serre. Cette approche permet d’internaliser le coût économique futur des émissions de gaz à effet de serre de chaque décision d’investissement (R&D, infrastructures, actifs financiers, etc.). L’objectif est «de comprendre l’impact qu’aurait un prix du carbone sur la stratégie et sur le calcul du taux de rentabilité interne des investissements de l’entreprise». Cette pratique se combine tout à fait avec une analyse de scénarios.
Cependant, il convient de rappeler que la monétisation constitue un levier intéressant si elle se fonde sur des valeurs qui font consensus. Concernant la valeur du carbone, il existe une multiplicité de méthodes de calcul qui aboutissent à des prix très disparates. Il faut créer un référentiel commun pour permettre une réelle comparabilité et une base suffisamment solide afin de pouvoir privilégier les investissements bas-carbone par rapport à ceux fortement émetteurs, de manière fiable. De plus, en deçà d’un certain seuil, le prix du carbone n’est pas réellement contraignant pour orienter les décisions vers des alternatives durables.
Comptabilité intégrée – La comptabilité est la base de l’univers économique de l’entreprise. «Toute compréhension de l’entreprise passe par sa comptabilité», dont l’analyse et l’interprétation donnent une vision de la performance et guident la prise de décisions. Or les enjeux de durabilité sont absents de cet univers comptable : «la comptabilité financière ne donne ainsi pas une image fidèle de la situation globale de l’entreprise, empêchant les acteurs de prendre des décisions avisées».
La comptabilité intégrée fait aujourd’hui l’objet de beaucoup de recherches. Elle est perçue comme un levier intéressant par un nombre croissant d’analystes pour réétudier la définition de rentabilité, intégrer les externalités négatives et positives de l’entreprise dans son chiffre d’affaires, et ainsi révéler sa création de valeur. La comptabilité intégrée peut venir compléter les avancées en cours sur les informations en matière de durabilité, notamment via la Directive Corporate Sustainability Reporting (CSRD) qui va harmoniser les indicateurs du «reporting en matière de durabilité » et poser un cadre contribuant à résoudre ces questions.
Une enveloppe environnementale ? – La consécration d’une enveloppe environnementale annuelle est citée comme un moyen de financer des études d’impact environnementales et des projets peu ou moins rentables, mais qui apportent une plus-value en matière de durabilité. Une entreprise de notre GT témoigne ainsi avoir mis en place une enveloppe budgétaire à investir tous les 5 ans dans le déploiement d’actions de préservation de l’environnement. Attention toutefois à ce que cette enveloppe ne soit pas la caution d’un manque de prise en compte des enjeux environnementaux au sein de la stratégie de l’entreprise ; et qu’elle ne serve pas, non plus, de correctif ou de variable d’ajustement aux autres enveloppes budgétaires.
Inverser la hiérarchie entre les critères financiers et de durabilité ? – Au-delà de la prise en compte des enjeux environnementaux dans les décisions stratégiques, la pondération avec les autres enjeux est déterminante. Quels enjeux sont aussi pris en compte ? Quels sont ceux qui priment sur les enjeux environnementaux ?
Des enjeux financiers, liés aux risques, technologiques, sociaux et sociétaux, sont intégrés. Toutefois, face à la prépondérance des critères financiers dans les décisions stratégiques des entreprises, il semble pertinent d’étudier la possibilité de renverser la hiérarchie entre performance financière et performance environnementale et sociale.
Par exemple, l’entreprise peut analyser les meilleurs projets par rapport à l’objectif de l’entreprise, avec une attention particulière portée à leurs impacts environnementaux, puis à un contrôle sur l’acceptabilité de la profitabilité de l’investissement au regard des capacités de financement disponibles ...»-Source:  Cliquez ici 


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Elaboré par: Lobna ZOUAOUI, Ingénieur Data, Responsable  Veille Stratégique et Technologique
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