Diffusion Sélective de l'Information
Du 11 au 21 octobre 2021


 

                                                                         
                                                                    RSE & Innovations

Une responsabilité sociale élargie, vecteur d’innovations sociétales et de performance, comme socle de transformation de l’entreprise et recréation de la confiance
«...« Le développement durable, un paradigme capable de générer des innovations de rupture, est lui-même une philosophie économique de rupture » qui ouvre le champ de la responsabilité sociale (RSE) élargie. Pour nombre d’entreprises, la RSE est principalement une réponse aux risques, notamment d’image et de réputation, perçue comme telle dans la société. Cette RSE utilisatrice n’intègre pas les processus de création de valeur de l’entreprise, d’innovation. Or, la crise systémique impactant l’activité économique de l’entreprise et sa relation aux parties prenantes, une forme de défiance se cristallise qui affecte son capital humain et érode sa performance. Les grands défis sociaux et environnementaux requièrent de reconsidérer la finalité et l’objet social de l’entreprise, de reconcevoir la place de la société dans sa recherche de performance. La RSE se raisonne en un défi de création de valeur permettant de réconcilier performance économique et performance sociale. « Adopter le prisme de la valeur partagée, ouvre l’entreprise à d’importants champs d’innovations ».

Introduction
Les crises économiques et environnementales, turbulences sociales et politiques au niveau mondial muées en crise de confiance impactent l’activité des organisations. Dans ce contexte, des transformations profondes se font jour qui structurent le monde des entreprises. Pour répondre aux enjeux sociétaux (lutte contre le changement climatique, préservation de l’environnement et des ressources naturelles dont écosystèmes et biodiversité, enjeux sociaux, paupérisation) l’entreprise est désignée au plus haut niveau comme un acteur clé. Le GEO-5 pour les entreprises du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) adresse des préconisations aux entreprises pour intégrer les problèmes environnementaux dans leur stratégie. Les Objectifs du millénaire post 2015 somment l’entreprise de « sortir de la trajectoire du statu quo pour évoluer vers un développement soutenable ». Face à ces défis et pour relever ses enjeux de durabilité même en termes de compétitivité économique, d’adaptation et de contribution aux changements sociétaux qui s’opèrent, l’entreprise mature dans l’exercice de sa responsabilité sociale, lui reconnaît être un levier de création de valeur. Recréant de la confiance, fondement de l’action individuelle et collective, autour de projets communs ambitieux porteurs de sens, cette forme de RSE génère la performance.
La création de valeur est posée comme résultant d’une démarche de RSE aboutie, portée au cœur des activités de l’entreprise et mobilisant son capital humain, induisant la performance globale. C’est en effet au niveau de ses parties prenantes internes que réside le véritable moteur du développement des innovations responsables ; par leurs efforts, créativité, valeurs partagées elles en sont l’essence. «A la fois déterminants, leviers ou freins et parfois destinataires de la RSE» elles sont le premier vecteur de performance. Par ailleurs, l’approche terrain qui consiste en une étude de cas, si elle satisfait au besoin de l’approche exploratoire visée, ne permet pas la généralisation des résultats. Définition et notion de responsabilité sociale de l’entreprise Eu égard à l’orientation de la recherche, la définition de la Commission Européenne est retenue car elle met l’accent sur les stratégies et le comportement des entreprises. Dans son livre vert de 2001, la Commission définit la démarche comme allant au-delà de la Loi par «l’intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et relations avec leurs parties prenantes». L’alignant en 2011 sur l’ISO 26000, la Commission confirme l’évolution de la RSE vers le droit dur comme «la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société». Les notions et dimensions du développement durable et de la RSE tendent à converger sous l’impulsion de la norme. Cette convergence est sous-tendue dans l’étude, sous le vocable indifféremment de responsabilité sociale, responsabilité sociétale, ou RSE...
L’hypothèse de recherche vise une élaboration théorique du lien entre l’alignement stratégique de la RSE comme levier puissant d’innovation et la création de valeur partagée. La grille d’analyse retenue pour cette évaluation s’inspire de celles d’Ingham (2011) pour l’innovation responsable et de Vollenbroek (2002) qui porte sur les liens dynamiques entre l’innovation et le progrès sociétal...

1. La RSE au cœur de la stratégie : un levier pour muter vers de nouveaux modèles économiques ou managériaux, pour créer valeur et confiance
Répondre aux enjeux sociétaux et prendre en compte les effets de son activité sur la société, dans un contexte de crise systémique est en résonnance avec le propre enjeu de durabilité de l’entreprise.
S’adapter aux changements sociétaux et y contribuer pour continuer à prospérer, s’opère via un renforcement de la relation aux parties prenantes, à la fois requérant et engendrant la confiance.
1.1. De l’innovation à l’innovation responsable : définitions et approches stratégiques
L’innovation selon le Manuel d’Oslo est « un processus itératif initié par la perception de l’opportunité dont le développement, la production et le marketing tentent de conduire au succès commercial ». La définition de l’OCDE (1991) est retenue car la notion de valeur y est centrale, soulignée au sens de création, laquelle sous-tend la performance comme inhérente à l’innovation. Elle permet de traiter les liens entre innovation et RSE. Les stratégies d’innovation constituent un gage de pérennité pour les organisations, indépendamment de leur taille. L’innovation responsable s’entend au sens traditionnel du management stratégique et la RSE au sens de la Commission Européenne. L’alignement stratégique des innovations responsables, à savoir le lien entre vision, mission et stratégie est fondamental dans la démarche (Hamel, Prahalad, 1989), (Ingham, 2011) qui conduit à la responsabilité élargie (Lamarque, 2012). Un point déterminant réside à leur conférer un objectif de création de valeur sociétale (Ingham, 2011) ou valeur partagée (Porter, Kramer, 2011).
1.2. La RSE au cœur de la stratégie, un puissant levier d’innovation vecteur de création de valeur et de transformation de l’entreprise
Le champ de l’étude est centré sur des entreprises dont les stratégies de responsabilité sociale sont proactives, ambitionnant un positionnement pionnier. Les démarches de RSE sont soutenues par des intentions stratégiques qui aboutissent à des approches distinctes. Par exemple, la démarche utilitariste répond à l’argument économique selon deux axes. L’un escompte des résultats économiques améliorés grâce à la réduction des coûts ; la création de valeur financière et immatérielle attirant les capitaux. L’autre se fonde sur la théorie des ressources et compétences, réside en termes de processus et consiste à produire une ressource stratégique. L’attitude proactive retenue en objet d’étude consiste à installer la RSE dans la stratégie intrinsèque de l’entreprise. Il s’agit de faire entrer les dimensions sociales et environnementales dans l’organisation, les faire peser sur la transformation du système de management en vue d’entrainer le changement dans les métiers et influer son développement à long terme.
La RSE se raisonne en un défi de création de valeur qui permet de réconcilier performance économique et performance sociale, en catalyseur d’innovations au service de la vision stratégique. L’innovation se traduit dans la mission et l’élaboration des stratégies, visant une régénération des approches du management stratégique suggérée selon un chemin de maturité. Pour Vollenbroek (2002), des liens dynamiques existent entre innovation et progrès sociétal, impliquant concrètement la société dès lors que l’entreprise se dote d’un modèle processuel de transition managériale et oriente l’innovation vers le développement durable. La RSE est reconnue comme vecteur d’innovations créatrices de valeur. Pour Eccles et Serafeim (2013), l’innovation sociétale outre les stratégies durables, pourrait soutenir la performance financière qui s’avère décliner en l’absence d’innovations substantielles, à mesure que la performance environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) progresse. Kanter (1999) soutient pour la grande entreprise, que la RSE placée au cœur de l’activité permet de créer des opportunités d’innovations contribuant à la performance. La PME, dont la structure est propice aux stratégies de rupture, dispose de son côté de ressources et avantages spécifiques relatifs à sa flexibilité, sa relation de proximité avec les clients utilisateurs pour saisir les opportunités d’innovation responsable (Ingham, 2011).
Si la valorisation des politiques de RSE et valeurs sociétales crées n’est pas traitée en tant que telle, l’étude mentionne des réflexions qui ouvrent des champs au plan managérial et de la gouvernance. A titre d’exemple, Lamarque (2012) propose leur prise en compte par le banquier et l’investisseur en tant qu’actifs spécifiques. Hollandts et Valiorgue, (2011) définissent la démarche de RSE comme un « processus entrepreneurial de conversion de valeurs sociétales en valeurs marchandes ». Porter et Kramer (2011) arguent que l’entreprise dispose des moyens pour se créer des opportunités de valeur partagée. Igalens (2012) rappelle que Porter et Kramer (2011) distinguent la responsabilité sociétale de la valeur partagée, faisant le constat d’échec des programmes de RSE à transformer l’entreprise. Ils précisent que « l’objectif de l’entreprise doit être redéfini autour de la valeur partagée » (Igalens, 2012) ; l’entreprise responsable devant analyser la relation avec ses parties prenantes. Pour Igalens (2012), le concept de la valeur partagée offre l’avantage d’élargir celui traditionnel de valeur économique en le couplant à la notion de progrès social. Dans la sphère du management et de la stratégie, nombre de voix d’experts s’élèvent qui prônent le retour à des conditions managériales et une organisation propices à une entreprise agile et innovante. Ferrary et Pesqueux (2006) distinguent la logique industrielle, basée sur le contrôle et la hiérarchie, de la logique du savoir basée sur un encadrement venant en soutien de collaborateurs autonomes. Il est question d’empowerment ou empuissancement des salariés, de « démanteler la bureaucratie et créer un environnement au sein duquel les salariés peuvent donner le meilleur d’eux-mêmes ».
Au plan de la gouvernance, des travaux prônent le passage d’une vision actionnariale à une vision partenariale pour contribuer tant au développement du capital financier, qu’humain et organisationnel, ce générant confiance et création de valeur. Pour autant, la gouvernance actionnariale et partenariale ne s’opposent pas, les actionnaires recherchant aussi du sens dans leur placement, à l’instar de l’Investissement socialement responsable ISR (Persais, 2013), de l’investissement à impact social (Impact Investing). Un modèle de gouvernance élargie plus collaboratif est suggéré, basé sur l’idée que l’efficacité économique et la légitimité démocratique peuvent se renforcer mutuellement (Hess, 2007), (Persais, 2013). L’enjeu pour la gouvernance réside dans l’exigence de responsabilité à laquelle l’entreprise doit faire face, quant à inciter les dirigeants à construire une entreprise durable et responsable où éthique et RSE constituent le vecteur, comme le produit, d’une politique générale ambitieuse. La présence d’experts en considérations sociétales est préconisée pour apporter un regard différent sur les interactions de l’entreprise avec son environnement et promouvoir un équilibre dans ses multiples intérêts en jeu (Persais, 2013)
L’étude théorique montre qu’en adoptant une stratégie résolument proactive, toute entreprise peut opérer sa mutation vers un modèle de développement soutenable, mobilisant organisation, système de management, métiers, gouvernance et influer son développement sur le long terme. Outre des innovations de procédés, produits et services, l’entreprise proactive produit des innovations stratégiques capables de créer de nouveaux modèles économiques, des innovations managériales de nature à retisser la confiance. La RSE intégrée au cœur de la stratégie de l’entreprise, visant la création de valeur sociétale ou partagée, est un levier d’innovation et de performance.

Conclusion

L’étude pose la RSE en clé de voûte d’une vision d’entreprise cohérente et source d’émergence de nouveaux avantages compétitifs durables, la démarche relevant d’une vision élargie du rôle de l’entreprise portée par le dirigeant. La RSE s’impose comme une valeur normative fondamentale qui guide la réflexion stratégique et conduit à des approches sociétales innovantes. A l’instar du portage d’une politique de diversité, sous-catégorie de la RSE, engager une stratégie de responsabilité sociétale ambitieuse, visant la création de valeur partagée, engendre un processus de changement organisationnel de nature à impacter le patrimoine de l’entreprise, sous couvert de consécration institutionnelle.
La capacité d’une entreprise à développer une pensée RSE globale et interactive, systémique, recréée la confiance. La vision stratégique partagée par l’ensemble de son corps social régénère l’engagement et « là où la confiance crée la coopération, la coopération façonne la performance »...»- Source: https://www.cairn.info/revue-questions-de-management-2015-1-page-29.htm- Cliquez ici
Par: Fabienne GUILLAUD

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